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Masque apouema
UM.ETHN.02988
Nouvelle-Calédonie

Coiffure en cheveux et fibres tressés, masque en bois noir, narines peintes en rouge. Couvre-nuque en vannerie. Le manteau est en plûmes noires et brunes réunies par des cordelettes. Devant, sous le masque pendent des cordes en cheveux. Corde de suspension. / Souvent qualifié d'apouema, ce type de masque est tout fait caractéristique du style sculptural en vigueur dans le Nord de la Grande-Terre. On peut le décomposer en 3 parties : le sommet du masque ou coiffe (Tidi) est de forme tronconique. Cet amoncellement est constitué de cheveux humains, soutenu et modelé par une armature de fougères arborescentes invisible à l''il. La figure est traditionnellement façonnée de façon convexe dans du bois de houp ou de l'arbre doi. Elle est inscrite dans une ellipse à corolle renforcée au niveau du front et du menton (on constate la présence de trous de fixation pour la coiffe et la robe sur le pourtour). L'équilibre du visage repose sur le nez proéminent dont les narines épatées sont colorées par un pigment rouge. Les arcades sourcilières sont marquées alors que les yeux sont rendus discrètement. La bouche rectangulaire est creusée dans la masse pour permettre la vision du porteur. La patine noire est habituellement obtenue par le grillage et l'écrasement de la noix de bancoulier (euphorbiacées). La partie en bois est entourée d'une corde en cheveux tressés à laquelle sont attachées plusieurs cordelettes de la même matière. L'arrière du masque est consolidé par une vannerie de fibres végétales faisant office de couvre-nuque pour le porteur. La robe de plumes est fixée à cette vannerie. La base du masque est constituée d'une robe de plumes sombres provenant traditionnellement du notou (Phoanorina Goliath Gray ou ju-mèni) sorte de gros pigeon insulaire. Ces plumes sont ficelées par groupes de 3 ou 4 et dissimulent le corps du porteur.

Selon l'ethnologue Jean Guiart, le tidi représente le chapeau que portaient autrefois les notables. Les cheveux utilisés seraient ceux de deuilleurs qui, suite à la mort d'une personne importante, ont veillé le corps jusqu'à sa complète décomposition. Pendant toute cette durée (parfois plusieurs années), ils laissent pousser leurs cheveux et leurs barbes. A la fin du processus de décomposition, les deuilleurs emmènent les ossements dans la forêt puis se coupent les cheveux avant de les placer sur un masque lors de la cérémonie du pilou-pilou. Suite à une danse nocturne l'assistance « est ensuite invitée à accompagner l'âme du défunt jusque chez Téà piijèpaa, maître du pays sous-marin des morts »(BENSA A., Nouvelle-Calédonie, un paradis dans la tourmente, éd. Gallimard, 1990). Les premiers observateurs occidentaux ont noté que ces masques étaient portés lors de fêtes tribales. Ils seraient peut-être la représentation symbolique du lien qui unit le monde des vivants à celui des morts. En tout cas, le masque apouema semble être un attribut et une représentation de la chefferie qui exprime ainsi une relation politique. « un beau tidi ['] est dès lors un indice de haute dignité » (GUIART J., Mythologie du masque en Nouvelle-Calédonie, Nelle Ed). Selon Alban Bensa (Le masque dans la région de Touho (aire linguistique cémuhi) Nouvelle-Calédonie, Océanie le masque au long cours, éd. Ouest France, 1983, A. Bensa : Maître assistant à l'Université Paris V en 1983) : « En dédiant au chef ce symbole de l'autochtonie, les responsables du masque manifestent clairement qu'ils sont la base de l'ensemble politique dont le daame (chef) devra extérioriser la puissance et le renom ».